Hermann et Gabrielle : Lettres du front macédonien (8)
18 novembre 1916
Chère soeurette,
Je viens de recevoir une de vos lettres dans laquelle vous me faites un petit reproche au sujet de ma correspondance un peu délaissée. Vous avez raison, à cette époque là mes occupations journalières m'empêchaient d'être plus souvent à vous. Heureusement il n'en est plus ainsi aujourd'hui car la population civile a été évacuée et cela me rend plus libre. Pardonnez-moi alors et dorénavant vous aurez plus de nouvelles.
J'ai quelque chose d'intéressant à vous annoncer : j'ai reçu une lettre-carte de Constantinople. Il est vrai qu'elle a parcouru un long chemin mais elle est arrivée quand même. Tout le monde se porte bien et n'est nullement dérangé par les turcs.
C'est maman qui m'écrit, vous pensez si j'ai été heureux. Aussi j'ai vite répondu et espère avoir maintenant une lettre de temps à autre.
Je vous quitte chère frangine et espère que ma carte vous trouvera en bonne santé et habituée dans vos nouvelles occupations.
Recevez de votre frérot tout dévoué ses plus sincères amitiés.
Hermann
7 janvier 1917
Chère petite franginette,
Je suis vraiment confus d'avoir tant tardé à vous écrire mais croyez-le j'ai un travail monstre en ce moment. Je ne vous oublie pas malgré cela et c'est plus d'une fois que l'intention me venait de vous tracer quelques mots mais un ennui quelconque venait m'en empêcher.
Pendant quelques temps encore n'aurez-vous que quelques mots à la hâte de votre frangin mais ayez l'assurance que sa pensée vous suit et qu'il est toujours votre frérot tout dévoué.
Hermann
(Ne m'oubliez pas quand même, je n'ai d'ailleurs pas besoin de vous le rappeler)
En campagne 2 mars 1917
Bien chère frangine,
Mille fois pardon et toutes mes excuses pour avoir ainsi délaissé ma soeurette. Je suis vraiment un sauvage, évidemment je suis débordé de boulot mais j'aurais quand même pu malgré cela vous écrire depuis le temps deux ou trois fois.
Vous voyez que je suis franc et reconnais mon tort mais à l'avenir cela changera. Dans votre dernière lettre datée du 9 février vous croyez m'avoir froissé par vos petits envois. Détrompez vous, je vous comprends très bien mais n'est-ce pas juste de vous en remercier . Grande soeur comme vous en avez eu l'intention de l'être, vous y réussissez très bien et ayez l'assurance que celui qui vous écrit et pense à vous quand même le reconnaîtra toujours et redeviendra le frérot bon et assidu d'autrefois.
Hermann
*Jusqu'en 1930, l'agglomération s'appelait officiellement « Constantinople », et « Stamboul » ne désignait que la Vieille Ville (la péninsule historique). Ce nom fut étendu à toute la ville sous la forme moderne « Istanbul » à la suite de la réforme de la langue et de l'écriture turque par Atatürk en 1928.
A bientôt , bises